mercredi 18 mai 2011

FLAM, les hommes qui peuvent compter: Ciré Bâ.


La présente note de Poullori porte sur un homme qui est dans une situation favorable à un retour salutaire. La note n'a de sens que si on la situe dans le contexte de l’ouverture et de cette idée de large front si cher à Poullori.
**
L'histoire de Ciré Bâ est celle d’un garçon paisible qui croyait suivre un idéal ordinaire en y mettant toute la force de ses convictions et toute la vigueur d’un jeune étudiant meurtri par les injustices. Membre du Mouvement des Elèves et Etudiants Noirs de Mauritanie qui croisait le fer à l’université de Nouakchott avec les franges les plus chauvines et racistes de la Mauritanie, Ciré Bâ assiste impuissant au report du congrès des étudiants de 1986 qui devait, selon le principe de la présidence tournante, revenir aux francisants. Ciré Bâ qui est historien et dont le mémoire de maitrise portait sur l'histoire politique de la Mauritanie de 1946 à nos jours savait à quoi s'attendre. Après l’arrestation des initiateurs du Manifeste du negro mauritanien opprimé, le jeune Ciré Ba quitte Nouakchott dans des conditions entourées du plus grand secret et rejoint le Sénégal en 1986. Il débarque sans papiers, sans diplôme, sans le sou. Heureusement pour le jeune désargenté, la solidarité joue. Voici Ciré remis d'aplomb pour reprendre le combat. Avec Boubacar Diagana et Cherif Bâ notamment, une coordination s’organise pour prendre en mains les affaires des FLAM. Une direction collégiale dans laquelle Ciré assume le rôle stratégique de porte parole et chargé de communication. Aux âmes bien nées dit-on, la valeur n'attend point le nombre des années. La jeune équipe s'attelle à la médiatisation de la répression raciale qui s'abat sur les noirs de Mauritanie. Le résultat ne se fait pas attendre : les journaux, les hommes politiques de la majorité comme de l'opposition, les ONG de défense des droits de l'homme prennent sous leur aile l'équipe de jeunes qui portent sur leurs frêles épaules le destin de toute une communauté.
En 1989, le dictateur enragé fait monter la pression d'un cran et envoie vers le Sénégal et le Mali des fils du pays. A quelque chose malheur est bon. Le front se renforce et la jeune équipe peut désormais reposer sur des dizaines de milliers de déportés qui pour des motifs divers trépignent d'envie d'en découdre avec leurs bourreaux. L'énorme travail abattu alors par la coordination collégiale de Dakar et la section Europe vaut au mouvement un rayonnement international que d’aucuns assimilent à l'âge d'or des FLAM. Le sens du devoir, de l'histoire et sans doute la grande complicité qui unissait les jeunes camarades, plus soucieux de s'acquitter d'une tache que de paraître, y ont joué un rôle primordial. Le noyau autour de Ciré Bâ, Cherif Bâ, Boubacar Diagana pouvait compter sur la détermination et l’engagement de militants désintéressés et dévoués à la cause : Amadou Alpha Bâ, Sy Salah Eddine, Yaghine Haidara, Ousmane Diallo, Ama Thiam, Kaaw Touré, Amadou Birane Bal, Amar Ba, Mohamed Lemine Sagho, Mamadou Kane, Abdoul Khouddous Kamara et bien d'autres encore. Au milieu de cette bande de copains, une fille se distingue par son courage et sa détermination : Safi Wane qui pouvait aligner des réunions nocturnes jusqu'au petit matin pour enchainer avec ses cours à l'ENSUT. Il va sans dire que sans, d'une part, la motivation, la volonté et le désintéressement de ces militants et, de l'autre, les qualités de management de la coordination les résultats n'auraient pas été ceux que l’organisation a enregistrés.
En 1990, Ciré Bâ dépose ses affaires à Paris et rejoint une autre équipe dans les mêmes dispositions, avec Ousmane Diagana à la manœuvre. Ciré y joue sa partition. Les contacts presse audiovisuelle et écrite, c’est lui qui les monte et les entretient à une époque où beaucoup préféraient se taire de peur d’attirer des représailles sur la famille restée au pays. Mais pour une raison obscure (que Poullori préfère taire), Ciré Bâ disparaît des écrans radars et boude les micros qui lui avaient jusqu'ici permis de médiatiser le combat.
Quelques années plus tard, dans le cadre de la préparation du congrès de 1994, feu Saidou Kane tente de le sortir de sa trop jeune retraite. L'intransigeance et le trop grand formalisme de certains membres du mouvement font foirer la tentative de retour. Il n'y en aura pas d'autre.
Pour autant, Ciré Bâ ne s'éloigne pas du combat ni même des FLAM qu'il continue de porter dans son cœur.
Récemment, Ciré Bâ a fait quelques apparitions dans le cadre de la lutte contre le coup d'Etat du général Ould Abdel Aziz contre Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Comme du temps de la splendeur du département de la Communication des FLAM, Ciré a squatté quelques micros de médias couvrant ce combat pour la restauration de la démocratie dans lequel les FLAM s'étaient aussi inscrites.
Ciré Bâ a sans aucun doute tout ce qu'il faut pour reprendre du service dans le cadre de l'amorce d'un virage vers un large front. Il a l'avantage d'avoir servi de façon satisfaisante le Mouvement à un des moments les plus difficiles de sa vie. Il a cette légitimité du terrain et de l'histoire pour lui. Il les cumule avec sa disposition à s'entendre avec tout le monde et à être fédérateur. De plus, Ciré Bâ a une maturité politique, une connaissance des enjeux et de l'histoire de l'organisation de même qu'une vision politique qui lui permettent de jouer un rôle prépondérant dans la suite de la lutte.
Seulement Ciré Bâ n'appartient plus à l'organisation et ne dispose pas des moyens de peser sur ses choix. Et il n'est pas dit que ceux qui contrôlent aujourd'hui l'appareil du mouvement soient dans des dispositions qui les conduiraient à aller le chercher pour lui confier une tache quelconque.

A suivre: Ibiraahiima Abu Sal

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire