Les Forces de Libération Africaine de Mauritanie se sont emparées depuis quelques années du combat pour la justice, l’égalité et les droits de l’homme en général pour en faire une chasse-gardée et un fonds de commerce. Une atmosphère particulièrement sectaire essaie d’exclure de ce combat toute personne qui ne consent pas à se mettre sous la bannière de cette organisation.
La pensée unique et le sectarisme aidant, il est devenu courant d’entendre défendre l’idée que seul ce qui a été fait au sein de l’organisation doit trouver grâce aux yeux de l’humanité. « Le monopole du cœur », être sensible aux questions de justice et d’égalité, revendiquer une bonne et juste cohabitation entre les mauritaniens… toutes ces questions deviennent, aux yeux des animateurs du mouvement, des questions exclusives.
Or, nous devons à la vérité de rappeler que les signataires du « manifeste des 19 » en 1966 n’ont pas attendu la naissance de cette organisation pour s’instruire des injustices constatées quant à la distribution des rôles, des responsabilités, des droits et des richesses en Mauritanie. Ils n’ont jamais cédé leurs droits exclusifs à une quelconque organisation.
Plus tard, des hommes -très loin de la violence (toute verbale du reste) et de la logique de confrontation dans laquelle une partie de l’organisation essaie d’enfermer le débat- se sont illustrés dans ce combat et ce serait faire injure à leur mémoire, à leur mérite et à la justice que de réduire à néant leurs efforts, sous prétexte qu’ils ne sont pas affiliés aux FLAM.
L’imam Bouddah Ould Boussairy qui a condamné les atrocités faites aux noirs de Mauritanie au plus fort de la crise et à un moment où peu de voix osaient s’élever, mérite une mention spéciale. Après lui, feu Habib Ould Mahfoudh apporta une pierre précieuse au combat pour la justice en allant photographier et publier dans un journal en Mauritanie des charniers à Sori Mallé, Azlatt…
Tijane Koita, le maire sénateur de Kaédi a apporté une aide décisive au combat en sensibilisant la communauté internationale dans des réunions à Genève, en Amérique, en Autriche, en Afrique… Qu’il ait fini par se ranger du côté de celui qu’il combattait naguère n’efface en aucune manière le coup de pouce important qu’il apporta à la médiatisation de la cause.
D’autres encore ont investi le terrain des droits de l’homme en apportant plus que de la parole. Le seul livre de Sy Mahamadou, L’enfer d’Inal, a pesé plus que les discours de tous ces bavards qui essaient de faire main-basse sur un héritage fait d’apports multiples. On peut en dire autant des écrits de Rachid Ly, de Oumar Moussa Ba, de Boye Alassane…
Tous les articles de Ngaydé Abdarahmane, de Ba Bocar, de Ngaydé Soulé, de Abdoulaye Diagana, Doro Touré, Mohamed Dogui, Gemal Ould Yessa, Moustapha Diop, l’engagement de femmes et d’hommes de conviction comme ceux de l’OCVIDH, de l’AVOMM, de l’AFMAF, du COVIRE, des associations de défense des droits des réfugiés, des justes de Conscience et Résistance… tous ces hommes ont énormément apporté au combat, sans phares ni fanfares. Que dire des contributions de Fatimata Mbaye, de Me Brahim Ould Ebetty, de Ladji Traoré ? Et j’en passe et des meilleurs !
Au plus fort de la tempête, quand le tyran ould Taya lança sa folie meurtrière sur les noirs de Mauritanie, les FLAM qui ont prétendu privilégier la lutte armée se sont contentées de revendiquer des actions qui n’étaient que le fruit de l’imagination. A la vérité, soit des bergers peulhs révoltés par la confiscation de leurs troupeaux organisaient des opérations coup de poings pour récupérer ce dont ils avaient été injustement spoliés, soit c’étaient des citoyens ordinaires qui revenaient régler des comptes suite à l’assassinat d’un proche, soit enfin des organisations comme le M25 qui croisait le fer avec les troupes mauritaniennes de l’autre côté du fleuve.
Cette organisation en a d’ailleurs longtemps voulu aux FLAM, coupables de trop vouloir tirer à elles la couverture, alors que d’autres allaient risquer leur peau sur le terrain. En un mot, les uns restaient à l’ombre et squattaient les micros pendaient que les autres résistaient, au péril de leur vie. Les FLAM n’avaient de toutes les façons pas les moyens de mener un tel combat. Leur programme s’est limité à la propagande et au combat verbal.
Sur ce plan on ne dira jamais assez combien les aides accordées par le HCR, la Fondation Otto Benecke, l’église catholique…, notamment aux étudiants réfugiés, émoussèrent l’ardeur guerrière –si tant est qu’elle ait jamais existée- des militants, peu disposés à renoncer à un confort tout nouveau et au niveau de vie qui allait avec (les discours sur « le mythe de l’exil doré» ne changeront rien aux faits). On prétextait la poursuite d’études, un nouveau mariage, des enfants en bas âge… pour éviter d’aller soutenir le M25, le FURAM et les guerriers qui se battaient presque sans armes au bord du fleuve.
Dans le même temps, des jeunes -appartenant ou non au mouvement- ont pris le relais des leaders emprisonnés. En France surtout, une cellule s’activa à la rédaction d’un livre blanc sur les massacres perpétrés en Mauritanie et entrepris un profond travail de lobbying auprès des partis politiques, des organisations internationales et des médias. Que Doudou Ball ait fini, comme Koita, par changer de camp n’enlève rien au travail colossal qu’il abattît pour la cause de l’égalité et contre les injustices en Mauritanie.
Les apports de K.Wane (aujourd’hui dans une capitale africaine), de T.Wane. (dans un pays voisin de la Mauritanie), de Amadou T. (en France aujourd’hui), de Sy M., de O. Diagana… sont reconnus par tous ceux qui les ont côtoyés du temps où ils produisaient, en bons stakhanovistes des droits de l'homme, des travaux pour le mouvement. La plupart de ces jeunes (aujourd’hui quinquas) ont quitté l’organisation, n’en pouvant plus des errements et d’un radicalisme verbal qui peine à se traduire par des actes politiques porteurs (comme étaient partis avant eux pour les mêmes raisons, Ly Jibril, Mourtodo, Ibrahima Sarr, Kane Saidou).
Le plus cocasse c’est que dès qu’ils ont eu le dos tourné, leurs camarades d’hier ont fait répandre le bruit que c’étaient des agents de renseignement, que le mouvement le savait et que d’ailleurs il dispose d’éléments irréfutables contre eux comme des bulletins de salaires…
Au fil des ans et à défaut de pouvoir s’attaquer de façon frontale à l’adversaire commun (ceux qui s’opposent à l’avènement de l’égalité et de la justice entre tous les fils du pays), les plus sectaires (qui ont pris les commandes de l’organisation) se sont mus en donneurs de leçons qui s’en prennent et en veulent au monde entier, critiquant, insultant, pensant être les seuls à être sagataaBe et jambareeBe (guerrier, brave, téméraire…) alors que ce ne sont que des « mbiri caggal bawDi » (lutteur qui fait du bruit loin des arènes). Plus rien ne trouve grâce à leurs yeux.
Tous ceux qui font le choix de rentrer se battre pour faire aboutir des revendications au sujet de l’égalité, de la justice, de la place des nationalités en Mauritanie… se font traiter de traitres, de défaitistes… Mais traitres à quoi ? Qui sont les traitres à la cause ? Qui compromettent l’évolution de la situation ? Ceux qui viennent se battre et se confronter aux dures réalités ? Les combattants du clavier, du verbe et du net ?
Les ayatollahs du combat verbal et cybernétique gagneraient à revenir sur terre : ils ne sont pas les seuls à être sensibles aux questions de justice et de droit de l’homme. Il n’y a pas d’un côté les flamistes, les seuls, les vrais, les déterminés ; et de l’autre les défroqués qui ne font rien parce qu’ils ne sont pas aux FLAM ! Etre aux FLAM n’est pas une garantie de qualité. La preuve : qu’y fait-on aujourd’hui concrètement ? Qu’y a-t-on fait hier que d’autres n’ont pas fait (et même mieux) en dehors ?
Aujourd’hui, les FLAM prétendent attendre que les choses se règlent –d’elles-mêmes ? Par miracle ? Par d’autres combattants plus déterminés ?- pour pouvoir rentrer au pays. Mais que représentent-elles sur le terrain ? Combien de militants ? De sections ? De cellules ? J’ai envie de dire comme l’autre : les FLAM, combien de divisions ? Que pèsent-elles réellement ?
Tout ce bruit produit par les pourfendeurs du combat interne tente de cacher maladroitement une excroissance honteuse : la vérité c’est que les FLAM savent qu’elles risquent le ridicule en rentrant en Mauritanie. Le monde entier découvrirait enfin la vérité : en jetant leurs forces dans l’insulte faite à autrui et le combat verbal, les FLAM ont oublié l’essentiel c’est-à-dire encadrer les militants, structurer le mouvement sur le terrain.
Cette lacune aurait pu être comblée si l’égo surdimensionné de certains ne les avait conduits à vilipender les leaders sur le terrain qui sont pourtant des alliés objectifs : tout le monde est du même avis quant à l'identification du caractère injuste de la cohabitation en Mauritanie (encore une fois les FLAM n'ont rien inventé sur ce sujet).
Au lieu de cela, les FLAM les considèrent comme ceux qui leur ont retiré le pain de la bouche. Le nœud du combat est devenu une vulgaire lutte de préséance et…d’égos. On pleure sur une souffrance dans des pays d'asile qui offrent une situation acceptable (on a beau dire, on a beau faire, être réfugié à Dakar, à Dodel, à Matam ou à Ndioum ce n'est pas comme être réfugié aux USA ou en France) et on n'oublie le sort des populations meurtries sur le terrain, dans les camps, en Mauritanie dans des conditions insupportables ? Qui a obligé les cadres du mouvement à aller aux USA, au Danemark, en France…loin, bien loin des camps de réfugiés ?
Pour finir (provisoirement ?), quelques questions : Pourquoi, en guise de combat, Ibrahima Abou Sall, meilleur historien que leader et idéologue politique, s’en prend-il si violemment à des icones comme Saidou Kane, Mourtodo Diop et, moins pardonnable (parce que la personne n’était plus là pour se défendre), Tene Youssouf Guèye ? En quoi pensait-il faire avancer le combat ce faisant ?
Pourquoi Kaw Touré, le préposé au portage de la parole, s’invente-t-il dans le froid boréal de la Scandinavie, un passé de martyr victime des geôles de Ould Taya alors que tout le monde sait qu’il n’en est rien ?
En vérité, à la suite d’une réunion organisée par des délégués de classe à Kilinkaré (Kaédi) pour déclencher une grève de protestation suite à l’assassinat de Sy, Ba et Sarr en 1987, les risques d’arrestations étaient devenus très importants. Dès le lendemain Kaw Touré et Ousmane. K. ont traversé le fleuve pour échapper à une arrestation certaine. Des jeunes comme « Philo » W. furent arrêtés et torturés pendant que Kaw Touré était loin de Kaédi et de la Mauritanie. Telle est la vérité nue.
Des jeunes qui se font conduire au commissariat en Mauritanie (notamment du sud), il y en a tous les jours sans que cela ne donne lieu à la naissance d’un mythe du martyr et du super héros. Pourquoi essayer de mystifier les gens en s’inventant un passé qui n’est que le fruit de son imagination ? De quel fait de guerre se prévaut-il ? Alors qui a ruiné les chances de ce combat en privilégiant la propagande et le mythe au détriment de l’action concrète ? Signer des articles rédigés par d’autres n’y changera rien. On sait qui est qui.
Le but de ce rappel est d’attirer l’attention sur les dérives sectaires de ceux qui essaient de nous détourner de l’essentiel pour des raisons mystérieuses. A ceux-là qui ne savent débattre que par l'insulte et le nivellement par le bas, je ne sacrifierai pas une syllabe ; il ne sert à rien de vouloir nous distraire en nous éloignant du débat de fond. Il y a encore beaucoup de choses gênantes à révéler mais nous n’en sommes pas encore là. De toutes les façons entre nous chacun sait qui est qui.
Cette lutte faite de verbiages et de slogans creux a montré ses limites. L’idée c’est d’éviter que le mouvement tombe dans les mains de gens politiquement limités qui ne font que retarder le combat.
A défaut de ramener Oumar Moussa Ba, Ba Mamadou Bocar, Ousmane ou Boubacar Diagana, la suite peut être incarnée par des hommes, certes n’ayant pas la même carrure mais ayant plus d’ouverture et de clairvoyance que beaucoup d’autres : Abdarahmane Wone, Ibrahima Mifo Sow voire Abdoulaye Thiongane s'il cesse de se faire instrumentaliser par son voisin suédois qui ne lui arrive pas à la cheville. A condition qu’ils sortent de l’ombre et acceptent de mettre fin à la dérive des guerriers du verbe et du clavier.
Poullori Galo
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